Sermon pour les 10 ans de l’Immaculée Conception

 

Monseigneur,

Bien chers frères prêtres et diacres,

Mes très chers amis, du plus ancien au plus petit,

 

L’émotion est présente. La joie est forte. La gratitude est grande. Pour de multiples raisons. Communes. Personnelles. Connues ou cachées.

Il y a dix ans, nous étions quelques centaines et je pense pouvoir n’oublier personne, dans notre chapelle de l’Immaculée Conception que nous avions nettoyée de fonds en combles. Tous les âges. Que des bonnes volontés. Grâce à la confiance et la volonté de Mgr Aumonier et de l’abbé Ribeton, j’ai été rappelé des terres canadiennes. J’ai pu célébrer la première messe pour un bon groupe de fidèles motivés et reconnaissants, un 12 octobre 2008, sur l’autel amovible du pèlerinage de Notre-Dame de Chrétienté, devant une assistance nombreuse, assise sur des chaises de conférence.

Aujourd’hui, en union de prière et de charité avec tous ceux qui nous ont quitté, ceux qui ont déménagé et ceux qui n’ont pas pu venir, nous rendons grâce à Dieu, pour ces dix années où nous avons prié, grandi, muri, ri et souffert ensemble. 10 années de fondation mais surtout de conversion. De nombreuses joies et de vraies peines. Le Seigneur les connaît mieux que nous. Et par sa Mère, Il nous rend capable de les porter. L’Immac’ est née. Elle est d’abord l’œuvre de Dieu. C’est la vie de Dieu, la vie de la grâce qui la fait vivre, mais aussi par l’humble travail des nombreux prêtres et diacres qui s’y succèdent, déjà 16… et par l’œuvre de chacun d’entre vous.

Avec mes confrères de la Fraternité Saint-Pierre dont nous fêtons le 30ème anniversaire de la fondation, je tiens à vous témoigner notre immense reconnaissance pour votre soutien et votre confiance des débuts jusqu’à aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle nous devons faire une petite pause spirituelle, donner une journée au Bon Dieu dans ce sanctuaire marial, ce lieu chargé d’histoire. Juste pour prendre le temps de remercier pour tant de grâces reçues : les nombreux sacrements donnés et reçus, la belle unité de la communauté, tous ses services, les pèlerinages nombreux, particulièrement en Terre Sainte, Vézelay ou Cotignac, la conférence Saint Vincent de Paul, les groupes de foyers, les chorales, le service de messe nombreux et qui porte du fruit (premiers cérémoniaires sont ordonnés prêtres), de belles unités scoutes du Chesnay et des Europas menées par des maitrises nombreuses et de grande qualité, les écoles, en particulier Saint Joseph des Lys et Sainte Geneviève, la formation de nombreux diacres en vue du sacerdoce… Mais attention l’Immaculée ne rayonnera que dans la mesure où elle restera tournée vers Dieu et que tous ses membres auront le souci de leur salut et resteront tournés vers les autres. Le Christ le dit bien sous la plume de saint Jean : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples ».

Mes biens chers fidèles, mes bons amis, nous sommes catholiques, nous sommes attachés aux traditions liturgiques et disciplinaires de l’Eglise, mais nous sommes surtout appelés à être d’authentiques et humbles disciples du Christ. Etre disciple n’est pas un titre de gloire. Etre disciple n’est pas un état d’esprit à atteindre plus tard. Etre disciple n’est pas une étiquette. Etre disciple du Christ est une dignité, une responsabilité, un appel exigeant et personnel à la sainteté.

Jésus est notre maître, parce que nous savons qu’Il est la vérité. Mais que faut-il faire pour devenir ses disciples ?

Tout d’abord, le premier moyen pour devenir le disciple de Jésus est de le préférer : « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femmes, ses enfants, ses frères et sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple ». Dieu premier servi.

L’obstacle : la mondanité spirituelle, si souvent dénoncée à juste titre par la Pape. Ce cancer de la vie religieuse recherche le bien être personnel avant tout, l’entre soi ou esprit consommateur. Il arrête de servir Dieu mais utilise Dieu à  l’intérêt personnel.

Le remède, c’est la croix. Contemplation de la croix et de l’amour de Dieu par une vraie vie de prière personnelle. Sans cela, mes chers amis, nous serons écrasés par les peines ou balayés par la souffrance. Nous allons la vénérer.

A Poissy, le 4 mai 2014, je vous avais dit lors du renouvellement de nos promesses du baptême : « Mes amis, n’ayons peur d’être chrétiens : la foi, la charité et le courage paient. Rien ne peut égaler ou remplacer la bonne nouvelle et la grâce du Christ. Impossible de trouver d’autres raisons d’aimer, d’espérer, d’être pardonnés, d’être consolés, de vivre éternellement. Tout ce qui se dit en dehors du Christ est un océan de médiocrité et d’animalité. Aucun autre nom que celui du Christ ne peut nous sauver. Prêtre, diacre, séminariste, personnes mariées, grands-parents, célibataires, étudiants, guides et scouts, tous les jeunes, les enfants, les bébés, faisons vivre le nom du Christ par la sainteté de nos vies, l’unité de notre foi et le feu de notre charité. Mes chers paroissiens et amis de l’Immaculé, ,n’oublions jamais cette vérité qui doit informer nos vies. Baptisés et donc chrétiens, nous sommes fils de Dieu, nous pouvons être les porteurs de la lumière du Christ, nous devons être des missionnaires de l’amour de l’Esprit-Saint. »

J’ajouterais aujourd’hui, nous devons être des disciples de la croix. La croix est le don de Dieu, acceptons-la.

Ensuite, le deuxième moyen est de porter la croix. « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. ». Dieu premier suivi. Le Christ n’est pas une idée, un homme charismatique ou une personne très sage. Ce n’est pas un simple médecin de l’âme, un placebo mondain, culturel ou pratique. Porter sa croix est bien plus que supporter les contrariétés ou les déceptions. Porter sa croix, c’est coopérer personnellement à notre salut, au salut des âmes. Le Seigneur ne peut pas nous sauver malgré nous ou sans nous.

L’obstacle : la paresse spirituelle. Nous repoussons à plus tard ce que le Bon Dieu nous invite à être ou faire aujourd’hui. Prenons Dieu au sérieux. Arrêtons de souffler, de râler, d’arriver en retard ou de mener des sortes de double vie. Mort de toute vie spirituelle.

Le remède, c’est la Sainte Messe. Cœur et poumon de la vie chrétienne. Lieu du sacrifice et du renouvellement de l’Alliance. Eucharistie, nourriture de l’âme. La messe est l’amour du Cœur de Jésus disait si bien le saint curé d’Ars. Rien n’est plus sacré, ni plus beau, ni plus saint que la messe. Cette cathédrale magnifique de pierres et de verres a été édifiée pour qu’y soit célébrée la messe, non pour qu’elle devienne le lieu le plus visité de France. Mes bien chers amis, vous n’aimerez et goûterez les fruits de la messe que si vous en devenez familiers. La messe n’est pas une vitrine, ni un théâtre, ni un rassemblement. Elle est le renouvellement non sanglant du Sacrifice du Christ auquel nous sommes appelés à participer selon la mesure de notre offrande et le degré de charité de notre âme. L’assistance à la messe en semaine change tout. Ceux qui prennent les moyens et le temps peuvent en témoigner.

A Villepreux, le 16 juin 2012, lors de notre consécration au Cœur Sacré de Jésus, je vous avais dit ceci du haut de la chaire de Saint Vincent de Paul : « Notre famille se doit aussi de chercher à observer une vie de la foi toujours plus profonde et unie à Dieu. Il faut maintenir ces trois aspects de la vie chrétienne : la vie sacramentelle et liturgique, la connaissance vraie de Dieu et la vie de la charité, l’amour de Dieu, indissociable de l’amour envers notre prochain. »

La messe est le don du Christ, suivons-la.

Enfin, le troisième moyen est de renoncer à tous les biens. Ne soyons pas comme le jeune homme riche. « Si tu veux posséder la vie éternelle, va, vends tout ce que tu possèdes et suis-moi ». Ce n’est pas simplement se dépouiller, renoncer, abandonner. Savoir se détacher de tout ce qui passe et même parfois ce qui semble acquis, pour le Christ.

L’obstacle majeur : l’orgueil spirituel. La tentation est forte de se glorifier des œuvres comme si elles ne venaient que de nous mais aussi de nos qualités, de nos privilèges spirituels. Ne soyons pas des pharisiens. Ne nous croyons pas tout permis. Ne cherchons pas des excuses. Arrêtons de juger nos frères. Cherchons d’abord à accomplir la volonté de Dieu. Mais c’est impossible seul. C’est pourquoi la dernière volonté du Christ a été de nous donner sa Mère, la Vierge Marie, modèle d’humilité.

Le remède, c’est donc Marie.

A Versailles, le 13 mai 2017, pour notre consécration au Cœur Immaculé de Marie, je vous avais dis : «  Avec Marie et grâce à elle, la Sainte Vierge, la Bonne Mère, qui est Maison d’or, Siège de la sagesse et refuge des pécheurs, nous ne serons ni seuls ni perdus ni enchainés ! Nous garderons toujours une joie intérieure, profonde, et authentique. Cette joie qui nous a été donnée et expliquée par le Christ lors du dernier repas : « Je vous ai dit ces choses pour que ma joie demeure en vous et que votre joie soit pleine et parfaite. ». La Vierge a assisté à ce dernier discours. Elle est la dépositaire de ce testament qu’elle nous transmet chaque jour. Frères et héritiers du Christ que nous sommes, nous ne pourrons percevoir cet héritage des mains de Notre-Dame que si nous y mettons toute notre bonne volonté à être humbles, vrais et saints. »

Marie est don de Jésus. Aimons-la.

Mes biens chers amis, acceptons d’aller jusqu’au bout de ce que le Seigneur nous demande. Si nous voulons mériter et porter la qualité de disciple du Christ, il aimer Jésus d’un amour de préférence. Il faut accepter d’embrasser la croix. Il faut accepter de tout quitter. C’est ainsi que nous deviendrons des autres Christ. « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples ». Certes, nous ne sommes pas parfaits et nous ne le serons jamais, mais, ensemble puisque nous formons désormais une grande famille, nous devons lutter, par la croix, dans la messe, avec Marie, pour préférer la vie éternelle à la vie terrestre.

 

Ave Maria, gratia plena,

Votre présence me rassure.

Votre pureté me guide.

Mon âme vous fait signe.

Mon cœur vous réclame.

Ma pensée vous cherche.

Votre regard m’encourage.

Vos larmes me convertissent.

Mes bras vous servent.

Ma foi vous appelle.

Ma joie vous reflète.

Votre cœur Immaculé me protège.

Votre honneur m’oblige.

Tota pulchra est Maria,

Fac cor nostrum secundum cor tuum.

 

Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il !

 

Abbé Vianney Le Roux, Notre Dame de Paris, le samedi 20 octobre 2018